La Nationale 2 ; le championnat le plus compliqué de France ?
Plusieurs clubs de Nationale 2 sont très performants dans cette division mais peu réussissent à décrocher le graal ou la montée dans la division supérieure.
La Nationale 1 ; plus qu'une division, pour les clubs, ça veut surtout dire devenir une structure professionnelle. Les places sont chères ; 56 équipes en NM2 et seulement quatre promus. Même avec de bons résultats sportifs, beaucoup de clubs n'ont pas l'ossature et les fonds nécessaires pour accéder à la NM1. Il n'est pas rare de voir des refus de montées : ESMS 40 (champion), l'ASA Souffel et BBM, Recy Saint Martin cette année, Le Cannet l'année passée, Lons le Saunier (champion) et Montbrison en 2023.
Il est même très fréquent de voir des clubs faire l'ascenseur entre les deux divisions tant le gap entre NM1 et NM2 est élevé. Les clubs restent entre une et trois saisons avant d'être obligés de redescendre sportivement ou administrativement.

Se stabiliser en Nationale 2 est difficile : coûts de déplacement, très peu de revenus car aucun droit télé ou merchandising, difficulté à faire venir ou de conserver des joueurs dominants. Si certains clubs arrivent à s'appuyer sur leur formation, beaucoup sont contraints d'aller chercher des joueurs extérieurs qui coûtent très cher : "les plus forts ou ceux qui sont vraiment installés dans le club, ils prennent 1500€ et un appartement. Cette année, il y a un gars qui prend 2500€, une voiture de fonction et une maison".
Il n'est d'ailleurs pas rare de voir des clubs être relégués pour cause de problèmes financiers ou administratifs : Cognac, Cherbourg et Pfastatt en 2018, Le Puy en Velay, Val d'Albret et Montivilliers en 2019, DA Dijon en 2020, Nantes et Lille (équipes réserves) en 2021, Agen en 2022, le WOSB en 2023.
Demander une rétrogradation en Nationale 3 peut-être une solution mais il y a aura toujours des problématiques. Tout d'abord, il y a un énorme gap entre les deux divisions ; certaines équipes montent de championnat régional, d'autres jouent pour se maintenir et ont un style de jeu très fermé/défensif. Comme expliqué auparavant, il n'est pas rare de voir des clubs faire l'ascenseur tant les exigences augmentent en NM2.
Il devient très compliqué d'approcher des joueurs confirmés (Espoirs, NCAA, étrangers) avec un projet en Nationale 3. D'autant plus que passer de la NM3 à la NM2, signifie moins d'argent et le départ probable des meilleurs joueurs qui veulent jouer plus haut. Si le club réussit à remonter, il devra faire face aux mêmes problématiques précédemment citées.
La Nationale 2 représente donc un casse-tête : trop prenant pour être considéré comme un simple loisir lors des weekends (niveau élevé, déplacements importants) mais pas assez développé pour être considéré comme professionnel (budget resserré et peu de revenus/médiatisation).
"t'es obligé d'être à fond dans le basket mais tu peux pas délaisser les cours parce que si tu ne perces pas, t'as rien pour vivre"
L'équilibre peut-être difficile à trouver entre le travail, le temps pour soi et le basket. C'est ce que nous explique un jeune joueur des Hauts-de-France pensionnaire du groupe D : "j'ai un emploi du temps aménagé mais ça m'arrive d'arriver en retard aux entraînements. T'es obligé d'être concentré en cours parce que tu ne peux pas travailler dans les transports ou quand tu rentres le soir après un entraînement". Cet équilibre est d'autant plus compliqué à trouver pour les jeunes joueurs qui sont encore étudiant : "t'es obligé d'être à fond dans le basket mais tu peux pas délaisser les cours parce que si tu ne perces pas, t'as rien pour vivre. C'est dur de gérer cet aspect dans ta carrière, surtout quand t'es jeune où t'as moins conscience de ça".
A l'inverse, David Cilly, joueur expérimenté de Tourcoing Saint-Michel réussit à jongler entre vie professionnelle et vie personnelle : "ma femme et mon fils me soutiennent, ils viennent avec moi lors des déplacements et on arrive à se retrouver tous ensemble. J'ai raté des mariages, des anniversaires et des évènements familiaux et j'ai aucun regret. Il y a toujours des gens déçus mais une grande partie de mon entourage comprend et me soutient."
Toujours actif à 44 ans, l'intérieur a connu plusieurs équipes entre la NM2 et la Pro B : "chaque club dans lequel j'ai joué, j'y suis resté 2-3 saisons et j'ai toujours eu le temps de m'acclimater, ma famille a suivi et ça permet de voir de nouveaux horizons. Il y a juste à Berck où j'ai dû rentrer sur la métropole lilloise pour mon fils qui en avait marre de changer de ville à chaque fois. J'aurai voulu partir à l'étranger aussi mais ça ce ne s'est pas fait. Après, comme je l'ai dit, je n'ai pas de regrets."
Les déplacements : le casse-tête des clubs ?
Les déplacements sont un autre problème pour les clubs. Pas tant sur l'aspect économique puisque cela représente seulement 6% des charges d'un club de NM2 selon la FFBB (synthèse 2018/19 de la Commission des contrôles de Gestion) mais sur l'aspect humain. Si les poules sont réparties géographiquement, certains clubs sont contraints d'enchaîner les kilomètres. D'autant plus qu'une grande majorité des joueurs ont un travail à côté du basket et doivent passer leur weekend dans les transports.
Un déplacement moyen en Nationale 2, c'est 4 heures de trajet(aller) et 400 kms (aller). Avec un match le samedi à 20h, il faut partir à 14h pour arriver en avance et prendre le temps de s'échauffer. Si le match se termine à 22h, le temps de quitter la salle et de faire le trajet retour, il est 3h du matin et les joueurs sont forcément fatigués du match, du déplacement, du manque de sommeil… Les joueurs ont pris ce temps tout leur weekend et doivent retourner au travail le lundi.
C'est ce qu'explique le jeune joueur des Hauts-de-France : "quand il y a un gros déplacement en Ile-de-France ou dans le Grand Est, tu pars en milieu d'aprèm, tu rentres dans la nuit et t'es presque 24h en dehors de chez toi. On fait beaucoup de pauses parce que les grands ne peuvent pas rester plusieurs heures en voiture. C'est toujours très long et t'es crevé, t'as que quelques heures pour profiter de ton weekend et tu ne peux pas rien faire sinon tu restes fatigué alors que tu dois enchaîner le lundi avec les cours et les entraînements."
Il explique que même les matchs à domicile sont très longs : "à la fin des matchs, on fait le tour du terrain pour voir les spectateurs, ensuite t'as un debrief dans le vestiaire de 20 minutes (dans son club), tu ressors pour prendre des photos, parler avec les gens. Seulement après, tu peux aller prendre ta douche, manger et rentrer chez toi. Moi j'habite dans une autre ville donc c'est 45 min-1 heure, je rentre chez moi il est presque 1h du matin."
Certains joueurs arrivent malgré tout à trouver un équilibre ; c'est le cas de David Cilly : "les déplacements c'est vraiment pesant, ça fait longtemps que je joue et ça commence à me saouler. Après, certains weekends sont fatigants mais c'est une organisation à avoir. J'adore le basket, je suis rémunéré, j'ai ma salle [il a ouvert sa salle de sport il y à 8 ans], je passe du temps avec ma famille donc je me plains pas."
Des clubs bénéficient de partenariat avec des transporteurs rendant les déplacements moins pénibles. Un club de la poule D (qui a voulu garder l'anonymat) explique que le partenariat avec la société de transport a un coût entre 20.000€ et 30.000€ par an. Bien que cela représente environ 10% du budget, l'objectif est de privilégier le confort des joueurs et même d'emmener certains supporters.
Lorsque les déplacements sont trop longs, les clubs n'ont pas d'autres choix que de se déplacer en train et de dormir à l'hôtel. C'est ce que nous explique un coach du groupe D excentré : "ce sont des conditions excellentes mais on a arrêté de le faire déjà pour l'aspect économique. L'aller retour en train, la nourriture, la nuit d'hôtel, ça monte vite à 5000€ voir plus pour un long déplacement. Sinon on se déplace en minibus où ça tourne plus autour de 500€ mais même là, c'est difficile de trouver deux chauffeurs prêts à conduire plusieurs heures et rentrer au milieu de la nuit. Il y a aussi l'aspect mental où quand mes joueurs étaient trop dans un confort, je nous trouvais apathiques et on commençait mal les matchs. Depuis qu'on a arrêté, on a plus de victoires à l'extérieur."
UNE COMPOSITION DES POULES, Victime d'incompréhensions.
C'est ce que l'on peut confirmer en coulisses avec un déplacement du RAC lors de cette première journée en Alsace. Qu'en sera-t-il de la performance de la bande à Maxime Lami sur le parquet de l'ASA Souffel, ce samedi ?
En plus des déplacements conséquents, le coach nous explique ne pas comprendre la composition des poules : "on pensait pas être dans cette poule et on n'aura pas le choix que de partir en train ou de réserver une nuit d'hôtel en partant en minibus pour certains déplacements. Il s'agit de coûts importants qui peuvent limiter sur la dotation, du matériel et même les recrutements. D'autant plus qu'on a appris la composition de la poule tard [le 5 août] alors qu'on avait anticipé notre pré-saison, les recrutements et les déplacements selon les équipes qu'on pensait affronter."
Il a même soulevé un autre problème qui paraît pourtant logique : "on a des joueurs qui sont en vacances en juillet-août et la saison redémarre en même temps que leur travail alors que les championnats professionnels reprennent plus tard ; ça devrait être l'inverse. Des joueurs semi-professionnels doivent revenir pour faire la pré-saison, profitent moins de leurs vacances et reprennent leur saison plus tôt que des professionnels qui vivent de ça".
Une nouvelle organisation visible pour la Nationale 2
Pour tenter de remédier à ce problème, Planète Basket National vous propose une nouvelle vision de la Nationale 2 : des poules contenant moins d'équipes, plus rapprochées géographiquement réduisant ainsi les déplacements.
Poule IDF + Grand Est - 11 équipes

Les équipes d'Ile de France se situent toutes à moins de 1h30 de voiture les unes des autres. Les équipes des Hauts-de-Seine sont presque voisines.
Recy est un peu isolé mais rejoint l'Ile de France en 2h30 (en bus) et l'Alsace en 3h. Kaysersberg, Holtzheim et l'ASA peuvent accéder à Paris en train depuis Strasbourg en deux heures.
Pour limiter encore plus les déplacements, on pourrait organiser des weekends avec plusieurs matchs pour éviter de nombreux déplacements, ce qui se fait déjà dans le Baseball en France.
Avec 11 équipes, la poule fonctionnerait avec un format classique de matchs aller-retour portant le nombre de rencontres à 20 par équipe.
Poule Hauts-de-France - 9 équipes

La densité d'équipes de haut niveau dans cette région est conséquente. Il y a ici seulement, sur cette carte la NM2, mais si on monte de division on retrouve Berck, Boulogne, Loon-Plage, Orchies, Denain (Pro B), Gravelines et Le Portel (Betclic Elite), ainsi que de nombreuses équipes féminines telles que ESBVALM Lille Villeneuve d'Ascq (LFB), Saint Amand (LF2), Calais, Trith ... (NF1).
Dans cette poule, aucun déplacement n'excédera 2h en voiture. Les clubs sont parfois si proches qu'ils peuvent être rejoints par d'autres moyens de transports ; Tourcoing et Wasquehal sont sur la même ligne de métro tandis que Calais-Ardres et Liévin-Dourges sont à 1h de vélo.
La poule étant composée de seulement neuf équipes, il y aurait des triples confrontations pour arriver à 24 matchs par saison.
Poule Nord Ouest - 10 équipes

C'est la poule qui va, malheureusement, le moins bénéficier de cette réorganisation en Nationale 2. Il faut dire que le Nord Ouest est une partie de la France avec peu d'équipes dans cette division. Aucune équipe bretonne, seulement deux en Normandie et six dans les Pays de la Loire.
D'autant plus que Cherbourg est isolé géographiquement, le club est contraint de réaliser des déplacements conséquents peu importe le niveau dans lequel il évolue. Situé en Nouvelle-Aquitaine, Niort s'insère dans cette poule pour ne pas avoir à faire des déplacements dans les Landes.
La JALT Le Mans et Gravenchon auraient pu être insérés dans la Poule Ile-de-France mais il y aurait trop peu d'équipes dans la Poule Nord Ouest. D'autant plus que cette poule prend en compte le Grand Est donc des déplacements démesurés pour le CS Gravenchon et la JALT.
Par conséquent, certains déplacements sont très longs comme entre Cherbourg ou Gravenchon et Montaigu ou Niort où le trajet dure 4h. Le reste des déplacements est limité à 3h30 de route. Dans cette poule de 10, il faudra effectuer des doubles confrontations pour porter le total de match à 18 par équipes.
Poule Sud Ouest - 9 équipes

La poule la plus victorieuse de 2024/25 : l'ESMS 40 a remporté le championnat NM2 et la fameuse Coupe des Landes face au Stade Montois qui a écrasé sa poule de NM3. BBM a vaincu Gravenchon lors du trophée Coupe de France.
Avec un nombre incalculable d'équipes landaises et aux alentours, les déplacements sont très courts dans cette poule Sud Ouest. L'ESMS, Mont de Marsan, Dax et Horsarrieu sont à environ 40 minutes de route. Hormis Bordeaux-Toulouse, tous les trajets se font en moins de 2h.
La passion que l'on retrouve dans le Sud Ouest nous donnerait droit à des derbys, des matchs à forte intensité avec des rivalités locales.
Il y aurait également des triples confrontations pour arriver à 24 matchs.
Poule Méditerranée - 8 équipes

C'est la poule qui bénéficierait le plus de cette réforme ; certains clubs sont voisins et aucun déplacement n'excède 3h.
Le Cannet et Vallauris sont à 12 minutes, Avignon-Rognonas en 15 minutes, Venelles et Rousset en 26 minutes.
La poule s'annonce d'ailleurs relevée : Le Cannet a remporté le championnat il y a peu de temps, Venelles n'a perdu qu'un seul match en NM3 la saison passée, l'USAP descend de NM1.
Dans cette poule Méditerranée composée de seulement 8 équipes, il faudrait également réaliser des triples confrontations pour porter le total à 21 matchs.
Poule Centre - 10 équipes

Dans cette poule, il y a une majorité d'équipes d'Auvergne Rhône Alpes ou très proches de cette région. Hormis pour LCB 58 qui est plus isolé, l'ensemble des déplacements ont une durée de 2h30 ou moins. Les transports utilisés seront bien plus économiques que ces jours-ci avec les poules actuelles à 14 équipes.
Certains clubs de cette zone géographique doivent aller dans le Sud Est, d'autres dans les Hauts-de-France ou dans le Grand Est rendant les déplacements supérieurs à 6h.
Dans cette poule de 10, il y aura seulement 18 matchs avec une formule classique aller-retour.
Fin de saison
Pour déterminer qui va monter en Nationale 1, on prend les premiers de chaque poule. Ces derniers participent à des tournois à trois sur une journée en terrain neutre.
Il y aurait un tournoi avec les premiers de Nord Ouest, Hauts-de-France et Ile de France + Grand Est et un tournoi avec Centre, Méditerranée et Sud Ouest.
Les deux premiers de chaque tournoi sont promus en NM1 et sont qualifiés pour un final four classique sur terrain neutre avec des demies et des finales.
Ce nouveau système permet de réduire les déplacements et favorise la qualité de vie hors basket pour les joueurs. Les clubs seraient en capacité de réduire les coûts liés au transport.
Un nouveau fonctionnement qui a des limites
Il y a pourtant de nouvelles problématiques avec cette réorganisation. Le nombre de matchs et le fonctionnement (aller-retour ou triple confrontation) qui n'est pas le même pour chaque équipe rend la compétition moins équilibrée selon la poule. Certaines équipes se présenteront parfois lors d'un tournoi de qualification avec 6 matchs de plus que son adversaire.
Certains clubs comme La Charité, Cherbourg et les clubs du Grand Est ne sont pas favorisés par cette réforme. Ces clubs sont malheureusement isolés géographiquement et seraient contraints de réaliser des déplacements conséquents peu importe leur poule. Il paraît plus logique de faire en sorte de réduire un maximum les déplacements pour le plus grand nombre d'équipes plutôt que tout le monde soit dans l'obligation de faire 4h de trajet.
Les joueurs que nous avons interrogé sont mitigés sur cette organisation de la Nationale 2 : "sur le court terme c'est cool parce que ça réduit les déplacements mais au bout de 3-4 saisons il y aurait aucun intérêt. Il y aurait tout le temps les mêmes matchs et les derbys auraient moins de valeur."
David Cilly rejoint cet avis : "évidemment que ça m'arrangerait parce que tu rentres beaucoup plus tôt les jours de matchs mais ça ne serait pas intéressant. Avec certains déplacements tu peux jouer dans des grandes salles avec une grosse ambiance ; c'est une expérience à vivre. Puis tu découvres des régions, d'autres clubs et d'autres joueurs. Pour l'équité du basket, t'es obligé de brasser les poules et d'aller voir ailleurs."
Thomas Pottier, joueur du club de Holtzheim explique : "en NM2, tu dois être capable de gérer un budget, d'assumer des longs déplacements surtout si tu veux monter en NM1 où il y a un gros gap en terme de niveau, de structure et de budget". L'arrière va entamer sa cinquième saison dans la division : "parfois j'aimerais bien rester chez moi mais t'es obligé de passer par là. Puis j'aime bien le basket à ce niveau, j'aime la compétition, je suis payé donc je me plains pas."
-> Chez un autre rédacteur on imagine, ici une réduction d'équipes à terme ou une sorte de NM2 Elite / NM2 honneur ce qu'il se produit déjà dans le Handball en N1. Fixer le nombre d'équipes à 40 en Nationale 2 ferait de la division une véritable ligue performante mais limiterait l'utilité de la NM3.
N1, N2, N3 finalement difficile de s'y retrouver, Certains ajustements pourraient être effectués par la FFBB pour faciliter la vie des clubs mais pour l'instant, il semble ne pas y avoir de situations idéales pour les structures et les joueurs de cette division. Les déplacements font partis du sport de haut niveau et ne pourront, de toute façon, pas être évités. Quoi qu'il arrive lors de cette première journée : 27 matchs se déroulent ce samedi et c'est près de 1500 kilomètres qui seront parcourus soit 7500 kilomètres l'aller, une moyenne de 537 kilomètres (aller retour) par équipes se déplaçant.
Un dossier de Zadig Marvylle avec G.C